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Résumé : Si un parent réalise seul des virements depuis les comptes bancaires de son enfant, la banque qui n’exige pas l’accord de l’autre parent peut engager sa responsabilité.
Cass, com. 12-06-2025, n° 24-13.604 (315 FS-B)
Les parents accomplissent ensemble les actes de disposition sur les biens du mineur. À défaut d’accord entre les parents, l’acte doit être autorisé par le juge des tutelles.
Un père, administrateur légal, avait demandé à la banque de ses enfants mineurs de transférer 5 000 € depuis leurs livrets d’épargne vers le compte de son entreprise. Il a ensuite poursuivi ses retraits et virements jusqu’à l’épuisement quasi-complet des comptes.
Averti, le juge des tutelles a désigné un administrateur ad hoc afin de protéger le patrimoine des enfants.
La mère, divorcée, a alors assigné la banque en justice pour manquement à son obligation de vigilance.
La cour d’appel d’Angers, le 5 décembre 2023, a condamné l’établissement bancaire à rembourser les fonds détournés, décision confirmée par la Cour de cassation.
Cette affaire posait une question fondamentale : un parent peut-il, seul, effectuer un retrait ou un virement sur un compte bancaire d’enfant mineur ?
La banque soutenait qu’elle n’était pas garante de l’usage des fonds, invoquant son devoir de non-ingérence et l’article 499 du Code civil.
Mais la Cour de cassation a rappelé les règles de l’administration légale du patrimoine des mineurs : certains actes, qualifiés d’actes de disposition, nécessitent l’accord conjoint des deux parents. À défaut, ils doivent être autorisés par le juge des tutelles, dont la fonction est exercée par le juge aux affaires familiales (Article L. 213-3 COJ).
Or, la modification de tout compte ou livret ouvert au nom d’une personne protégée est bien un acte de disposition (Annexe 1 du décret du 22 décembre 2008).
Ainsi, un virement sur le livret d’un enfant ou un retrait de fonds d’un compte épargne mineur ne peut être effectué que sous réserve du double accord parental.
En permettant au père d’agir seul, la banque a commis une faute engageant sa responsabilité bancaire sur les comptes des enfants mineurs.
Depuis le 1er janvier 2016, le régime d’administration légale a été unifié, mais la règle demeure identique. Tout acte de disposition modifiant le patrimoine d’un enfant requiert l’accord des deux parents titulaires de l’autorité parentale.
En cas de désaccord, le juge des tutelles est compétent pour trancher. Cette exigence vise à protéger juridiquement le patrimoine de l’enfant mineur contre tout détournement, y compris par l’un de ses parents.
La Cour de cassation conclue donc en ces termes :
“7. L’arrêt énonce que la banque est tenue à un devoir de vigilance et constate que M. [H] a fait procéder, seul, à des virements sur chacun des trois comptes d’épargne ouverts aux noms de ses enfants mineurs.
8. Il en résulte que la banque, en ne sollicitant pas l’autorisation de l’autre parent pour accomplir ces actes de disposition, a commis une faute engageant sa responsabilité.”
Pour les établissements bancaires, la leçon est claire : vérifier la nature des opérations demandées sur un compte d’épargne d’enfant est indispensable pour éviter une condamnation.
Le non-respect de cette règle expose la banque à voir sa responsabilité engagée et à devoir restituer les sommes prélevées.
Pour les parents, cette jurisprudence apporte une garantie : les comptes bancaires des mineurs sont placés sous une vigilance accrue et leur patrimoine bénéficie d’une protection renforcée.
En définitive, cet arrêt illustre parfaitement l’articulation entre responsabilité bancaire, autorité parentale et protection juridique du patrimoine des enfants mineurs.
Les banques doivent appliquer avec rigueur leur devoir de vigilance, et les parents doivent avoir conscience que la gestion des biens de leurs enfants n’est jamais une affaire individuelle, mais une responsabilité conjointe, sous le contrôle du juge des tutelles si nécessaire.