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Résumé : Lorsqu’un époux marié sous le régime de la communauté effectue un apport à une société avec des fonds communs, l’autre époux peut renoncer à la qualité d’associé pour la moitié des parts à condition que cette renonciation soit sans équivoque.
Cour de cassation, com. 12-03-2025, n° 23-22.372
Les époux s’étaient mariés sans contrat, donc sous le régime légal de la communauté.
L’épouse avait constitué la société TRANSPORTS N, dans laquelle elle avait apporté des biens communs.
En 2007, l’époux avait revendiqué la qualité d’associé. Il se heurtait cependant au refus de son épouse de lui communiquer les comptes sociaux, et l’assignait, avec la société, pour faire reconnaître ses droits.
L’épouse soutenaient que, depuis des années, les époux avaient pris des chemins professionnels distincts. Chacun avait créé sa propre société, sans interférence de l’autre, ce qui révélait, selon elle, une renonciation tacite à la qualité d’associé.
Toutefois, la Cour de Cassation rappelle qu’un époux peut renoncer à devenir associé, même tacitement, mais à condition que cette renonciation soit sans équivoque.
La cour de cassation fonde sa décision sur l’article 1832-2 du code civil :
« Un époux ne peut, sous la sanction prévue à l’article 1427, employer des biens communs pour faire un apport à une société ou acquérir des parts sociales non négociables sans que son conjoint en ait été averti et sans qu’il en soit justifié dans l’acte.
La qualité d’associé est reconnue à celui des époux qui fait l’apport ou réalise l’acquisition.
La qualité d’associé est également reconnue, pour la moitié des parts souscrites ou acquises, au conjoint qui a notifié à la société son intention d’être personnellement associé. Lorsqu’il notifie son intention lors de l’apport ou de l’acquisition, l’acceptation ou l’agrément des associés vaut pour les deux époux. Si cette notification est postérieure à l’apport ou à l’acquisition, les clauses d’agrément prévues à cet effet par les statuts sont opposables au conjoint ; lors de la délibération sur l’agrément, l’époux associé ne participe pas au vote et ses parts ne sont pas prises en compte pour le calcul du quorum et de la majorité.
Les dispositions du présent article ne sont applicables que dans les sociétés dont les parts ne sont pas négociables et seulement jusqu’à la dissolution de la communauté. »
En l’espèce, la Cour de cassation estime que le seul fait d’avoir constitué deux sociétés séparées ne suffit pas pour prouver la renonciation. D’autant que l’époux en question avait exercé plusieurs mandats pour le compte de la société de son épouse, ce qui rendait peu convaincante la thèse d’une distance professionnelle claire.
La Cour de cassation conclue ainsi :
« L’arrêt retient qu’en l’absence de toute clause d’agrément prévue aux statuts de la société Transports [N], susceptible de faire obstacle à la revendication de la qualité d’associé, ou d’accord familial démontré quant à la création de structures indépendantes, excluant l’intervention de l’époux non associé, le fait, pour M. [N] et Mme [B], d’avoir constitué, de manière concomitante, deux sociétés distinctes dont chaque époux était associé à concurrence de 50 %, sans que l’autre n’ait de participation, et la gouvernance de ces sociétés, est insuffisant à démontrer une renonciation sans équivoque, à la qualité d’associé, de chacun des époux au sein de la société constituée par son conjoint. »
Cet arrêt est un rappel utile pour tous les professionnels du droit de la famille : le choix du régime matrimonial et les modalités d’apport à une société doivent être pensés en amont. En cas de divorce, ces situations peuvent cristalliser de lourds contentieux.